En tant que professeur de mathématiques basé au Tampon, à quelques kilomètres seulement de l’un des volcans les plus actifs au monde, je ne peux qu’être fasciné par les liens profonds entre les mathématiques et la nature spectaculaire du Piton de la Fournaise. Ce géant endormi puis réveillé par moments nous offre bien plus qu’un spectacle naturel : c’est un véritable laboratoire à ciel ouvert pour les mathématiques.
🌋 Prévoir les éruptions : une question de modélisation
Les géophysiciens, en collaboration avec des mathématiciens, utilisent des modèles prédictifs complexes pour anticiper les éruptions. Ces modèles s’appuient sur :
L’analyse de données sismiques (nombre, fréquence et magnitude des tremblements de terre sous le volcan),
Les variations de pression dans les chambres magmatiques (modélisées à l’aide d’équations différentielles),
La déformation du sol mesurée par satellite (géométrie différentielle, modélisation vectorielle).
Ces données sont injectées dans des algorithmes qui permettent de simuler différents scénarios d’éruption, un peu comme on utilise les probabilités et les statistiques pour prédire des phénomènes en apparence aléatoires.
➕ Exemple concret :
Une augmentation de la sismicité sous le Dolomieu, combinée à une inflation du sol détectée par GPS, est un signal fort. Des modèles mathématiques permettent d’estimer la probabilité d’une éruption dans les jours qui suivent, ce qui est crucial pour la sécurité de la population.
📈 Des maths en profondeur : équations, courbes et topologie
Les scientifiques du Laboratoire GéoSciences Réunion (université de La Réunion) utilisent des systèmes dynamiques non linéaires pour étudier les cycles d’activité du volcan. Cela fait intervenir :
des courbes exponentielles pour la montée de pression,
des séries temporelles pour l’analyse des cycles éruptifs,
de la topologie pour comprendre la structure interne du volcan, comme les réseaux de fractures.
Bref, loin d’être réservées aux manuels, les mathématiques sont ici des outils de terrain.
🧠 Ateliers pédagogiques : fractales et volcans en classe
Avec mes élèves, j’intègre régulièrement des activités autour du volcan pour rendre les maths plus concrètes. Voici quelques idées d’ateliers que j’ai déjà menées ou que je propose :
🔸 Atelier 1 : Les fractales dans les coulées de lave
Observation de structures fractales dans les coulées : motifs répétés, autosimilarité.
Construction de la courbe de Koch ou du triangle de Sierpinski, en lien avec la nature.
🔸 Atelier 2 : Tracer une éruption en équation
Utilisation de fonctions logarithmiques et exponentielles pour modéliser une montée en pression.
Création de graphiques avec des outils numériques (type Geogebra) pour simuler des variations de température ou de pression.
🔸 Atelier 3 : Simulation d’une alerte éruption
Analyse de données fictives (sismiques, déformations).
Décision collective à partir d’un raisonnement probabiliste : alerte ou non ?
🌍 Une ouverture sur le monde scientifique
Travailler sur le Piton de la Fournaise permet aussi aux élèves de découvrir les métiers liés aux maths :
Volcanologue, bien sûr,
mais aussi data scientist, ingénieur géologue, ou chercheur en modélisation.
✍️ Conclusion : des maths qui parlent aux Réunionnais
Utiliser le volcan comme point d’entrée pour les mathématiques, c’est parler aux élèves dans leur réalité, leur environnement. C’est faire des maths un outil de compréhension du monde, et plus encore, un levier pour rêver, prévoir, innover.
Alors, la prochaine fois que le ciel s’illumine d’une lueur rouge sur le Piton, souvenons-nous qu’au cœur de cette beauté brute… se cachent des équations.